Plus que 365 jours… (205/365)

Septembre est une jardinière de prunes – XXII

Elle croit le connaitre; elle n’a pas imaginé qu’il marcherait de nuit, sans équivoque, alors elle a claironné sur tous les tons, sur tous les toits, Gaspard passera! Dites-lui à Gaspard qu’Heinrika l’attend à Eltville, ou plutôt que des mots d’Heinrika l’y attendent, car quand il sera à Eltville, Gaspard, elle aura déjà filé, Heinrika, filé de l’auberge Au Violon, dans cette ville qui est vieille et vigneronne, Eltville, au bord du Rhin. Elle a dit cela à beaucoup de monde, celle qui file le long du Rhin, en insistant bien: Gaspard, Heinrika, Eltville, auberge Au Violon, mots dans la ville pour retrouver celle qui trotte au fil du Rhin devant lui. Oui, elle est maintenant devant lui, elle file en trottant sur les berges, elle l’a dépassé sans qu’il le sache, celui qui croit la connaître et marche tranquillement derrière, à la fraîche. Elle a dit cela à beaucoup de monde, en ciblant de ses mots ceux qui passent du temps dehors, vignerons, paysans, autochtones dans leur jardin, habitués des berges, promeneurs de chiens, vieux ou pas, beaux ou pas, avec ou sans barbie-joggeuse, amoureux transis, vieillards rassis, sur un banc ou pas.
Seulement voilà, le Gaspard marche de nuit – douceur de nuit – et la nuit point de vigneron ni de laboureur, point de locaux dans les jardins, point de vieux ni de chien et les barbies-joggeuses dorment du sommeil du juste, ou pas, enveloppées par la nuit, ou pas. Alors il marche innocemment, le Gaspard, un pied après l’autre, buvant la nuit qui l’enveloppe de ses senteurs et ses sons, mais sans les mots de celle qui se prend pour le chat botté.

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