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Avril est vert – XVI

Gaspard descend volontiers à la cave lorsqu’il s’agit d’aller chercher de quoi réassortir l’armoire à vin qui se trouve dans la salle à manger de l’auberge. Dans la vaste cave, on lui a montré où se trouvaient les caisses dans lesquelles il devait puiser.

Au hasard d’une de ces descentes et d’un rayon de lumière qui entre par un saut-de-loup, il découvre une vieille lampe électrique en laiton sur une petite table en sapin, comme oubliée dans un recoin. Lorsqu’il retire la chaise qui est glissée sous la table, il voit un tiroir et l’ouvre. Il fait tourner l’interrupteur de la lampe posée sur la table, elle s’allume – elle est branchée à une prise électrique placée sous un interrupteur mural, à côté d’une porte qu’il n’avait pas vue. Dans le tiroir un carnet bleu – genre carnet d’épicier –, couvert d’empreintes de doigts, noires. Dans le carnet des dates et des décomptes qui ont été inscrits à l’aide d’un crayon bicolore – rouge d’un côté, bleu de l’autre. Gaspard ouvre la porte qui est juste à côté de la table, la chaufferie. Il allume le plafonnier à l’aide de l’interrupteur qui est à l’extérieur de la chaufferie, au-dessus de la prise à laquelle est branchée la lampe en laiton posée sur la table. Le local est grand, bien plus grand que l’espace nécessaire pour une chaufferie moderne. Dans un angle, il aperçoit une fenêtre placée pratiquement à la hauteur du plafond. Les murs qui forment l’angle sont noircis du sol au plafond et on voit du noir sur la fenêtre. Le carnet, les empreintes, les murs et la fenêtre, ce local a d’abord été la réserve de charbon. Il éteint le plafonnier, referme la porte, remet le carnet dans le tiroir, le referme, repousse la chaise sous la table, éteint la lampe de laiton et remonte avec le vin qu’il était venu chercher.

Ce recoin de l’auberge d’Hospental devient un des ces lieux de travail, il y vient chaque fois qu’il a besoin d’être absolument seul et de rester très concentré. La première fois qu’il descend écrire à la table en sapin, il ne peut s’empêcher d’aller à la chaufferie, de frotter ses mains contre les murs noircis et de marquer ses empreintes dans son carnet et dans le cahier à la couverture noire et aux pages blanches quadrillées de bleu dans lequel il rédige et met ses idées au propre.

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