Blanc comme janvier – XXIV
[journal du marcheur – extraits]
Réveillé tard, mais dormi peu. J’essaie de fixer sur le papier quelques bribes de la nuit écoulée. Je peine, et puis ce sonnet de Pessoa qui remonte à la surface.
« Pendant les grandes heures d’insomnie dressée
Lorsque l’esprit est clair et que son être insulte
Cet usage confus qui désoeuvre le jour,
Ainsi qu’un univers nouveau et douloureux,
–
Je médite, baigné par des ombres de paix
Que peuplent des fantômes, et où l’âme est cachée :
Que d’errements j’ai faits ! Comme douleur et joie
Ne me feront plus rien, telle une phrase inepte !
–
Je médite, gorgé de rien ; la nuit est tout.
Mon coeur, qui parle et parle en demeurant muet,
Répète sa torpeur et sa monotonie.
–
Dans l’ombre et le délire aussi de la clarté,
Et il n’y a ni Dieu, ni être, ni Nature ;
La blessure elle-même aurait dû faire mal. »
–
Faut-il vraiment rester encore ici, dans ce drôle de lieu, avec ces drôles de gens ? Rester vigilant. (…)