Plus que 365 jours… (215/365)

Octobre est un foyard – V

Il a commencé par marcher vite, afin qu’elle ne le rattrape pas, marcher en se faisant voir le moins possible, afin qu’il y ait peu de témoins, marcher sans parler à quiconque, afin que personne ne puisse lui dire quoi que ce soit, à elle qui marche derrière.

Elle a commencé par marcher à petits pas, afin de ne pas le rattraper, marcher en s’arrêtant souvent, de peur d’être aperçue de l’autre rive, marcher en silence, dessiner à couvert les paysages qu’elle montrera plus tard, à lui qui marche devant, mais en diagonale.

Sa mémoire le fait ralentir, il n’arrive plus à engranger tout ce qu’il veut écrire plus tard, alors il s’arrête et décrit – berge, forêt, coteaux ensoleillés, vendanges – dans son carnet, et il se met à traîner, à raturer, à couper les virgules en quatre; inconsciemment il souhaite être rattrapé par celle qui marche derrière, sauf qu’il ignore que c’est en biais de lui.

Sa main est sûre et rapide, plus que sa mémoire, elle le sait bien, alors elle se dit qu’il et temps d’enregistrer davantage et elle accélère pour mieux retenir, ses pas se font grands, dans sa tête des mots clés, des couleurs – berge, vert sapin, ubac, regains – elle résume, elle synthétise; délibérément elle souhaite revenir à sa hauteur et franchir le Rubicon d’un coup de rein, sans rougir.

Comme des fous, ils marchent en quinconce.

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