Plus que 365 jours… (206/365)

Septembre est une jardinière de prunes – XXIII

Huit heures se pointent lorsqu’il passe devant le violon, le Gaspard, l’auberge Au Violon, à Eltville, le long du Rhin, au milieu du vignoble, en Allemagne, fort loin de Riga.
La patronne qui prend le frais sur le pas de porte – de l’auberge Au Violon, à Eltville, le long du Rhin, au milieu du vignoble, en Allemagne, fort loin de Riga –, le reconnaît instantanément: stature, corpulence, forme du visage, forme des lunettes, couleur du sac – Heinrika l’a bien mise au courant – et le salue d’un joyeux Bonjour Gaspard! Interdit, Gaspard plante sur ses vibram et stoppe Au Violon, bouche bée. La patronne, qui n’est pas vilaine – bouche bée, le Gaspard –, le met à son tour au courant; Heinrika a dormi ici, elles ont déjeuné ensemble de très bon matin, dans la cuisine, et maintenant elle file le long du Rhin.
Il devient pâle, Gaspard et elle s’en inquiète, la patronne qui n’est pas vilaine et qui prend le frais devant son auberge, elle lui propose de reprendre des forces en déjeunant, il accepte et elle redéjeune avec lui, celle qui n’est pas vilaine à regarder, puis elle lui propose son lit, à Gaspard, pas le sien mais celui d’Heinrika, la chambre est payée mais pas encore faite, ne vous gênez pas, et n’allez pas me faire croire que vous ne lui courez pas après aussi un peu pour ça, c’est qu’elle n’est pas vilaine l’Heinrika qu’elle lui dit, la patronne pas vilaine, en le précédant dans l’escalier, le Gaspard, qui n’ose pas trop regarder devant lui car elle est un peu à l’étroit dans sa robe la patronne qui monte devant lui et qui n’est pas vilaine de dos non plus.
Seul dans la chambre Gaspard ne se sent pas pousser des ailes à l’idée de dormir dans le lit déjà payé qui garde l’empreinte tiède du corps d’Heinrika, le corps de celle qui est seule sur la berge et avance à grands pas, le corps de celle celle qui s’est parée des idées et des bottes du chat de Perrault, des bottes de sept lieues qui la font avancer tandis que Gaspard, immobile dans la chambre Au Violon, ne se sent pas pousser des ailes alors qu’il va dormir dans les plumes d’Heinrika.

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