Août rougeoie – XXX
Lieux et dialogues de l’été – XXIX
Frigidarium
On y entre par devoir, se déplacer, penduler, peut-être aussi par plaisir, sillonner, excursionner, voir du pays, quoi que.
La mobilité est devenue, pêle-mêle, une valeur, un droit, un devoir, l’aune à laquelle on mesure toute société: bougez, soyez mobiles!
On devrait être contents d’y entrer, il fait une des ces tièdes sur le quai! Plus que deux classes, de véritables salons climatisés, baies vitrées, électricité, Wi-Fi, bar à roulettes, et pourtant…; ça résonne comme dans une chambre froide, les gens ont du blanc aux oreilles, téléregardent mais ne voient pas, téléphonent mais ne s’adressent pas la parole, écoutent de la musique mais ne chantent pas ; au contrôleur ils montrent leur QR code, avec ou sans fluide glacial.
Plus de pique-nique partagés en troisièmes dans ces wagons frigorifiques, la climatisation mais pas d’atmosphère. Propos glaçants, morceaux choisis, vies privées, étalement du trivial. Difficile de parler, de lire, de rencontrer.
Alors on regrette presque la canicule du quai bondé, la sueur qui n’est pas froide et on se met à rêver de points chauds, le front collé à la glace.