Plus que 365 jours… (173/365)

Août rougeoie – XXI
Lieux et dialogues de l’été – XX
Friche

De nombreux membres de l’association Vivre ici ont adopté le credo de Paola « …il est urgent de relier les lieux importants de notre ville, les lieux de l’écrit, les lieux de parole, les lieux d’apprentissage, les lieux qui nourrissent », Rose ne fait pas exception. Aussi, lorsqu’elle parcourt la ville, est-elle plus attentive à tout ce qui fait les rues et les ruelles: bâtiments, échoppes, trottoirs, balcons, arrière-cours, jardins, gens qui passent, enfants qui jouent, badauds et autres personnes qui stationnent: personnes âgées, parents qui gardent un oeil sur les enfants qui jouent tout en discutant par petits groupes, marginaux, squatteurs, chiens errants, et caetera, et caetera.
Traînant son caddie dans la canicule d’un après-midi d’août – ce mois qui rougeoie, mais dont la fin approche –, elle n’a pas le courage de rentrer chez elle, à cette heure de l’après-midi son appartement est une étuve, alors elle cherche le frais dans la ville, Rose. En débouchant de la grand place, côté ancienne gendarmerie, elle avise la petite rue qui débouche sur l’artère qui longe l’ancien triage – des voies de fer qui dessinent comme un muscle bombé lorsqu’on regarde la carte topographique. Elle n’est plus passée dans cette rue depuis longtemps, Rose, cette rue qui sentait bon autrefois, mais la savonnerie n’est plus là. Elle s’arrête et observe ce qui fait cette rue, Rose. Deux bâtiments modernes au commencement, un de chaque côté, puis du vide; d’un côté ce vide est un terrain vague qui accueille de temps à autre une petite fête foraine, de l’autre côté ce vide est un peu aménagé, quelques bancs en bordure et des jeux pour les enfants. Plusieurs bancs sont à l’ombre mais ils sont occupés. Rose avise la chapelle qui fait suite à la place de jeu, – tiens, se dit-elle, elle est toujours debout, et si j’entrais un instant? Rose imagine qu’elle pourrait y trouver le frais, comme parfois l’été dans une chapelle isolée au milieu de la campagne brûlante, mais la porte est fermée et un panneau orange annonce une mise à l’enquête en cours, on veut détruire la chapelle pour construire des logements et un café – une autre fin qui approche, l’édifice désuet ne verra sans doute pas décembre. Rose avance un peu dans la rue, sur le trottoir qui est à l’ombre; soudain une porte bleue l’invite à traverser, alors elle brave le soleil quelques mètres, Rose. De l’air frais et humide jaillit de la vieille bâtisse par la porte ouverte, Rose s’approche et commence à lire l’ardoise de bistrot appuyée contre le mur. Elle n’a pas lu trois mots qu’une voix chaleureuse l’invite à entrer:
– Accepteriez-vous que je vous offre une kombucha et qu’on bavarde un instant?

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