J’ai eu 20 ans l’année du Grand Confinement – épisode 30/x

Yggdrasil cycle 2, l’arbre à palabres

Épisode 30
Et le dossier valsa (façon de parler)

Le dossier finit par être bouclé et l’on put mettre à l’enquête. On ne dressera pas ici la liste de toutes les pièces  que contenait le dossier, elles étaient toutes là – si on est intéressé, on trouvera sur le site de l’administration cantonale la liste de toutes les pièces que doit contenir un dossier de mise à l’enquête – mais on rappellera que ce dossier était spécial puis qu’il s’agissait d’une mise à l’enquête a posteriori (après coup, en vaudois), il fallait donc expliquer et justifier deux ou trois choses; pour ce faire, on avait adjoint aux pièces habituelles le fameux préambule (épisodes 24 à 28) et douze plaidoyers, ceux des juré.e.s – invités ou tombés du ciel –, dont on trouve des extraits aux épisodes 22, 23 et 29. Si on suit bien, suivez mon regard, on ne se demande pas pourquoi 13 juré.e.s et seulement douze plaidoyers, car on se souvient, suivez mon regard (épisodes 20 et 21), que Jean, syndic et juré n° 1, n’écrit pas mais parle et agit, ce qui est rare en politique, suivez mon regard…

Et le dossier bouclé, Jean agit de plus belle; il fait valser le dossier d’un stempel à l’autre, reliant au pas de charge les bureaux de l’administration communale dont on avait briefé les chefs, les sous-chefs et les subalternes, suivez mon regard. La danse ressemble donc plus à un tango viril qu’à une valse, mais peu importe et, comme on le verra plus tard, bien plus tard, dans les bureaux cantonaux ce sera une autre danse, une sorte de bourrée auvergnate, mais en plus lent, en plus vaudois, genre on se tâte au printemps et on verra cet hiver.
Dans les bureaux communaux personne n’est choqué par cette prise en main autoritaire, on dirait que Jean se réveille enfin, et il a meilleure mine, il semble qu’il boit moins, la couperose recule, sans doute grâce au jus de groseille dont il devient addict, mais gare au diabète Jean! C’est fou comme il change notre syndic, il est plus fit, devient viril et presque beau, il a quelqu’un tu crois, on dit qu’il en pince, et réciproquement, pour une employée de l’urbanisme, entre eux y’aurait des clins d’oeil.
Clins d’oeil ou pas, le lendemain de la publication dans la feuille des avis officiels l’enquête commence, pour 30 jours.

Alors on s’active dans le bourg, on encourage les gens à visiter le verger et sa maison de paille, on fait tout pour éviter les oppositions, on soigne l’accueil, le jus de groseille et le cidre coulent à flots mais aussi le vin, le thé, les tisanes et le café, le four tourne à plein régime, il en sort du pain, des tartes salées et sucrées, des pizzas, des focaccia, et bien d’autres douceurs encore.

Lors des mises à l’enquête, on consulte les dossiers à l’administration communale et ceux-ci comportent une rubrique « remarques » dans laquelle tout un chacun peut s’exprimer; dans le cas de cette mise à l’enquête a posteriori, rappelons-le, on a prévu un double du dossier in situ, et la rubrique « remarques » se remplit un peu comme un livre d’or à la fin d’une exposition. En guise d’avant-goût, voici un ou deux extraits de ce qui s’y écrivit:

C’et très beau! Si j’aurait pu étudié dan un jardin avec une maîtrese que pour moi habitant dans une maizon en paille, je l’aurait eût, mon certifica d’étud, je l’aurait eu, pour sûr! Fernand, recalez en 1936

J’aim Mirabel, la soeur d’Alcid, c’et la plu bel. Miguel, 6 ans

Tout est si beau, et si bio! Et ces gens, quel régal! Perrine