Personne aussi n’a jamais reconnu la ville qu’il avait quittée, forcé qu’il était de suivre sa mère, une veuve remariée à un diplomate qu’on envoya à Durban représenter le Portugal; Personne était alors un petit garçon de cinq ans qui ne reviendrait à Lisbonne qu’à l’âge de dix-sept ans, sans pour autant retrouver sa ville. Alors Fernando, qui est à Lisbonne avec Mathilde, n’est pas étonné de ne pas retrouver la ville dans laquelle il a vécu quelques mois vers l’âge de cinq ans, avec ses parents et deux de ses grands-parents, c’était la période à laquelle les oeillets avaient refleuri au Portugal, juste avant que lui aussi, le petit garçon de cinq ans, parte de Lisbonne, pour la Suisse, une vieille démocratie qui s’était mise à importer des étrangers après avoir longtemps exporté des mercenaires. Il n’est pas étonné Fernando, mais il est triste, et inquiet; s’il ne retrouve pas la ville dans laquelle il a vécu quelques mois à l’âge où les enfants commencent à avoir des souvenirs précis, qu’en sera-t-il de son Algarve natale, ce sud du sud où il veut emmener Mathilde?