Plus que 365 jours… (254/365)

Novembre est une fleur flammes – XV

Arrivées…

A1
On appelait ce lieu la brise, car il était plein de courants d’air, mais on se tenait chaud, humainement parlant. C’est qu’on avait été passablement refroidi à notre arrivée, au sens figuré. Là-bas on nous avait parlé de bons emplois, de bons logements, on nous avait dit qu’ici on aimait mieux les Espagnols, mieux éduqués que les ltaliens, plus courageux aussi, ils osaient tenir tête à Franco. On a découvert que les emplois étaient durs, que les bons logements avaient un prix plus élevé que nos salaires et que les gens détestaient les Italiens, alors aimer plus les Espagnols, on a vite compris ce que cela voulait dire! Ceux qui n’avaient rien à craindre du Général sont très vite repartis au pays et nous on est resté comme des cons dans la brise, avec nos auréoles d’anti-franquistes qui ne nous chauffaient pas et n’éclairaient pas plus.

A2
Je suis arrivé à dix-sept ans dans un hôtel des Alpes, en plein mois de novembre. Le patron m’a pris mon passeport et m’a mis au boulot. Au bout d’une semaine j’ai craqué et j’ai voulu repartir. Le patron m’a ri au nez et m’a collé une claque, je lui ai sauté dessus, je l’ai foutu par terre, j’ai attrapé l’ouvre-lettres sur son bureau et je l’ai menacé à la gorge. Il m’a rendu mon passeport et j’ai sauté dans un train, avec l’ouvre-lettres, au cas où. J’avais l’adresse d’un cousin qui habitait ici  c’était prévu que je le voie de temps en temps –, alors je suis allé chez lui pour me retaper quelques jours avant de rentrer au pays. Il m’a convaincu de rester et m’a trouvé une place dans une imprimerie, grâce à un  Catalan. Dans ma famille on admirait Franco, mais c’est un républicain qui a fait de moi un typographe, bientôt une graine d’anarchiste…