Septembre est une jardinière de prunes – XIX
En repensant aux discussions d’Hospental avec celle qui file maintenant le long du Rhin – mais il ne le sait pas, Gaspard, qu’elle file le long du Rhin, Heinrika, qu’elle l’a dépassé, il ne le sait pas encore –, il se dit qu’il faut laisser des traces dans des types de lieux dont ils ont parlé, ou dans des lieux reliés à des sujets dont ils ont parlé.
Ils ont parlé de musées, ils ont parlé de carnavals et, sensible comme elle est, elle a forcément vu les affiches de l’exposition des costumes au Mainzer Fastnachtsmuseum, il en a vu dans plusieurs rues, il doit y en avoir à la gare, donc elle en a vues puisqu’elle est arrivée en train. Arrivé devant ce musée, son attention est attirée par une affiche dont un des coins inférieurs est décollé; dans sa tête un déclic, il se souvient avoir vu dans un livre qu’il a reçu, un livre à propos d’un oiseau qui dessine et qui peint, une telle affiche avec, au dos du coin décollé, un message de quelqu’un qui complimente l’oiseau pour ce qu’il fait et signe de son prénom. Il sort alors son stylo et écrit au dos de l’affiche dont un des coins inférieurs est décollé devant le Mainzer Fastnachtsmuseum J’aime être dans cette ville avec toi. Gaspard, puis il file sans demander son reste, de peur qu’on ne le surprenne, de peur qu’elle ne le surprenne.
Pauvre Gaspard qui renonce à la belle exposition, pauvre Gaspard qui ne sait pas qu’il est devancé, qui ne sait pas que c’est elle qui mène désormais la danse, qui ne sait pas encore qu’elle file le long du Rhin. Coin, coin.