Plus que 365 jours… (46/365)

Orangé comme février – XV

Paulinho ne poursuit pas immédiatement son récit. Il se lève tranquillement, repousse sa chaise en arrière, sort son couteau, l’ouvre ; puis on le voit disparaître sous la table. Ceux qui assistent à la scène restent assis, mais reculent avec leur chaise et se penchent pour regarder sous la table ; ils sont trois, ceux qui assistent à cette scène : le couple – les hôtes de ce lieu depuis peu de temps – et le marcheur du blanc, arrivé quelques jours après eux, leur premier hôte.

Ce qu’ils voient sous la table n’a rien d’inquiétant. A l’aide de son couteau, Paulinho soulève des morceaux de plancher – une sorte de trappe que l’on n’avait pas encore vue –, les dépose, plonge ses mains dans le trou sombre, mains qui ressortent en tenant un grand rectangle, assez épais, d’un certain poids, si l’on en juge par ses gestes. Il pose le rectangle à côté des morceaux de plancher. Le plancher et le couteau sont refermés, le rectangle est posé sur la table et Paulinho reprend sa place, mais pas encore le récit.

L’objet rectangulaire n’est pas encore visible, il est emballé dans un sac de toile, du lin. Paulinho en sort un grand livre, format atlas, relié en cuir, un beau cuir brun chocolat, un chocolat qui aurait une bonne teneur en cacao. Sur la couverture, finement incrustées, dix lettres argentées, un mot, Chroniques. Paulinho ne l’ouvre pas, il fait durer le plaisir. Il dit : «C’est à Peter que l’on doit ce recueil ; il a fabriqué le papier qu’il a cousu en cahiers qu’il a reliés pour en faire ce livre, puis il s’est mis à rédiger ; les premières chroniques sont de lui. Mais de tout cela, je vous parlerai plus tard, pour l’instant, écoutons-le.» Paulinho ouvre Chroniques et se met à lire.

«Judith et moi, Peter, son compagnon, ne sommes pas arrivés ici par hasard. Mais expliquer exactement pourquoi nous sommes ici, et exactement ici, relève à la fois du facile et du difficile. » [à suivre…]