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Blanc comme janvier – XXV

Parler de son rêve d’avoir un jardin à lui, un jardin qui serait inspiré du jardin de son grand-père ? Il n’ose pas, pas encore. Commenter son projet à elle, suggérer des idées, il ose encore moins. Mais il ose mettre un pied dans la porte, discrètement, de façon feutrée, comme s’il chaussait des pantoufles.

Il lui dit que tout projet sérieux – et son projet à elle a l’air sérieux, s’empresse-t-il d’ajouter – doit se baser sur un plan rigoureux, un plan exact. Alors ils mesurent le jardin avec une ficelle graduée, une grosse ficelle de chanvre avec un noeud tous les mètres.

Ils feignent de ne pas voir qu’on les observe d’une fenêtre, mais ils feignent séparément, chacun à un bout de la ficelle, sans parler.

En réalité, il sait bien qu’une simple esquisse suffit pour imaginer un projet – d’ailleurs il le trouve beau le plan qu’elle a esquissé dans son carnet –, mais il a besoin de mettre son grain de sel, de gagner du temps, de trouver une façon de lui parler de son projet à lui. Il sait que ce sera difficile, très difficile ; comment imaginer qu’il pourra réaliser un projet à lui dans son jardin à elle ? Et a-t-il le droit d’imaginer cela ?

Peut-être a-t-il aussi besoin de montrer ses compétences et de se trouver un rôle dans ce jardin qui n’est pas le sien, même si elle lui a tout de suite fait sentir qu’il était le bienvenu, et qu’il sent bien qu’elle ne doit pas avoir de mépris pour le travail manuel ni faire de hiérarchie entre les différentes manifestations de l’intelligence.

Pour préparer le terrain – le moment où il lui parlera de son projet à lui –, il raconte sa petite enfance dans le jardin de son grand-père.